Le stade de la discorde

Saint-Pétersbourg | La garde partagée des Rays entre la région de la baie de Tampa et Montréal pourrait-elle débuter avant 2028, comme cela a parfois été évoqué ? Ce n’est pas totalement impossible. Mais les obstacles à surmonter seront nombreux, surtout sur la côte Ouest de la Floride.

« Si ces saisons divisées devaient commencer avant 2028, l’équipe devrait en venir à un nouvel accord avec la Ville », rappelle le maire de St. Petersburg, Rick Kriseman.

Car le bail de location de 30 ans du Tropicana Field signé par les Rays, qui vient à échéance en 2027, est très clair. Le club ne peut disputer aucun match local dans un autre marché.

Rompre les liens avec le Tropicana Field coûterait des dizaines de millions aux Rays. Et pour l’instant, les plans de ses potentiels domiciles dans la région, que ce soient à St. Petersburg ou à Tampa, n’ont pas encore été approuvés.

L’un des pires

Le Tropicana Field. Le stade des Rays. Voilà qui semble être le plus grand sujet de discorde à St. Petersburg.

L’enceinte sportive a ouvert ses portes en 1990. Elle a d’ailleurs accueilli le Lightning de Tampa Bay de ses débuts dans la Ligue nationale de hockey jusqu’en 1996.

Les Rays s’y sont installés en 1998, à leur première année dans la MLB.

Souvent cité comme l’un des pires stades du baseball majeur, le Tropicana Field paraît déjà vétuste de l’extérieur, avec ses murs grisâtres et son allure de gros bol.

Mais à l’intérieur, c’est pire. Les murs de bétons gris qui entourent le terrain rappellent le Stade olympique de Montréal. Par chance, les bancs bleus et les affiches des commanditaires colorent un peu le triste décor.

Il y a aussi cette toile grise et beige au plafond, dont la solidité pourrait inquiéter s’il neigeait abondamment dans cette région de la Floride.

À l’abri de la chaleur

Pourtant, selon le maire Kriseman et d’autres personnes proches des Rays, l’état du stade n’est pas la raison pour laquelle les partisans ne s’y déplacent pas (voir autre texte en page 103).

« Si vous êtes allés en Floride en été, vous savez que c’est chaud. Ça peut être 95 degrés Fahrenheit [35 degrés Celsius)] avec de l’humidité. Si vous êtes dans le stade, ce sera environ 72 °F [22 °C], soulève-t-il. Du point de vue de la température, c’est toujours parfait. Il ne pleut jamais ! »

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« Je regarde le stade neuf des Marlins [de Miami]. Leurs assistances sont plus basses que les nôtres. Ça ne peut pas donc être que le stade, le problème », a-t-il ajouté.

Tout même, le Tropicana Field détonne dans son secteur. Il y a bien un bar sportif à quelques minutes de marche, mais la majorité des autres commerces avoisinants sont de petits restaurants branchés ou des boutiques de mode. Même lors d’un après-midi de semaine, l’artère est achalandée.

Projet de revitalisation

Pas étonnant, donc, que M. Kriseman ait fait du projet de revitalisation du secteur l’un de ses chevaux de bataille depuis son arrivée au pouvoir, en 2014.

Le maire étudie différentes possibilités pour le développement du terrain de 86 acres sur lequel se trouve le Tropicana Field. Certaines comportent un nouveau stade ; d’autres non.

D’autres secteurs sont aussi envisagés pour la construction d’un stade plus petit et ouvert, que ce soit à St. Petersburg ou même à Tampa, où la mairesse Jane Castor est prête à accueillir l’équipe.

Toujours dans l’optique où les Rays pourraient y jouer des demi-saisons.

À recommencer

S’il est l’un des derniers acteurs importants de la région de Tampa Bay à s’être farouchement opposé au projet de garde partagée avec Montréal, M. Kriseman sait bien que le dossier sera bientôt hors de sa portée.

Début janvier, il quittera ses fonctions de façon définitive. Et si le propriétaire des Rays, Stuart Sternberg, ainsi que le baseball majeur sont en faveur du projet de garde partagée, c’est aussi le cas de la majorité des membres du conseil municipal, dont certains sont candidats à la mairie.

M. Kriseman désire « une résolution » ou « davantage de clarté » dans le dossier du stade et de l’avenir des Rays avant de quitter son bureau le 5 janvier.

Mais son successeur voudra assurément recommencer à neuf et que les Rays soient aussi assis à la table de négociations. Ce qui n’a pas été le cas au cours des dernières années et qui a souvent été décrié par les élus municipaux.

L’incertitude nuit aux Rays

Rick Kriseman.  Maire de St.  Pétersbourg

Photo courtoisie

Rick Kriseman. Maire de St. Pétersbourg

Si les Rays de Tampa Bay peinent à attirer des foules décentes malgré leurs excellents résultats sur le terrain au cours des dernières saisons, ce n’est pas la faute du Tropicana Field, croit le maire de St. Petersburg, Rick Kriseman.

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Il attribue plutôt la moyenne de 9000 spectateurs de la dernière année en partie à la pandémie de COVID-19.

Car même si le stade peut désormais recevoir quelque 25 000 spectateurs, le maire estime que plusieurs partisans craignent de se retrouver dans une aussi grosse foule.

« Il existe aussi ce climat d’incertitude qui entoure l’équipe depuis plusieurs années, a ajouté M. Kriseman. Est-ce que St. Petersburg sera l’endroit où l’équipe jouera à long terme, va-t-elle déménager ? Vous demandez à des fans de dépenser leur argent, de s’impliquer émotivement auprès d’une équipe dont on ne connaît pas l’avenir. »

Le manque de transport public jusqu’au terrain et les nombreuses activités proposées dans ce secteur de la Floride font aussi partie des raisons qui expliquent les foules peu nombreuses aux matchs des Rays, selon M. Kriseman.

Ils préfèrent même le hockey

Mais sur le terrain, on nous explique aussi que le baseball n’a jamais été le sport de prédilection dans l’ouest de la Floride.

Et surtout pas depuis deux ans, avec les deux coupes Stanley du Lightning dans la LNH et le Super Bowl remporté par les Buccaneers dans la NFL.

« Quand on y pense, les Rays n’ont que 24 ans. Les jeunes qui aimaient l’équipe il y a quelques années commencent à avoir un travail, de l’argent. Ils commencent à emmener leurs enfants au stade. Ce n’est pas une longue tradition », a expliqué une source proche de l’organisation.

Pas le bon bassin

En Floride, on retrouve aussi de nombreux retraités provenant d’un peu partout aux États-Unis.

Des hommes et des femmes qui viennent de New York, de Boston ou même de Detroit et qui, une fois arrivés dans le sud, continuent d’encourager les Yankees, les Red Sox ou les Tigers, bien avant les Rays.

« Le problème en Floride, c’est que la démographie n’est pas optimale pour le baseball majeur », a récemment soulevé le chroniqueur John Romano, du journal Tampa Bay Times.

« Afin de vendre des billets, vous avez besoin d’avoir l’argent des sièges sociaux, qui vont acheter des places pour leurs clients, pour leurs employés. Mais l’industrie de la Floride n’est pas basée sur les corporations. Elle est basée sur le tourisme. »

Il faudra convaincre les joueurs

Si le projet de garde partagée d’une équipe du baseball majeur entre la région de Tampa Bay et Montréal est sur la bonne voie, il risque cependant de se heurter à un bastion de résistance : les joueurs.

Dans l’entourage des Rays, on nous explique que les jeunes joueurs risquent d’être favorables à cette saison divisée.

« Les jeunes célibataires, ils vont se dire : “Tu me payes pour que j’aille jouer une demi-saison à Montréal et que je profite de la vie là-bas ? Wow !” », raconte une source bien au fait de la situation.

Convention collective

Mais ce possible déménagement de trois ou quatre mois par année à quelque 2000 kilomètres au nord ne plaira pas aux joueurs plus âgés dont les enfants sont inscrits à l’école en Floride et dont les femmes travaillent dans la région.

Le projet de saison divisée risque donc de faire écho durant les négociations pour la prochaine convention collective du baseball majeur.

Celle-ci sera échue le 1er décembre.

Le Journal a joint Tony Clark, le directeur de l’Association des joueurs. Il a toutefois décliné notre demande d’entrevue puisque le processus de négociations est amorcé.

L’an dernier, M. Clark avait affirmé au quotidien Tampa Bay Times qu’il préférait voir les Rays demeurer dans la région de la baie de Tampa à temps plein.

« Je ne pense pas que ce soit impossible que l’on en vienne à un accord qui soit acceptable pour eux, mais ça ne représenterait pas une situation idéale pour les joueurs ni pour les partisans dans les deux villes », avait alors déclaré le directeur de l’Association des joueurs.

Les Rayons de Tampa

Fondés en 1998

  • Appelés les Devil Rays de Tampa Bay jusqu’en 2008
  • Participations aux éliminatoires : 7
  • Participation à la Série mondiale : 1
    (2020 : défaits en 6 matchs par les Dodgers)
  • Valeur de l’équipe : 1,055 milliard $ (1,338  G$ CAD) selon Forbes (29e sur 30 clubs)
  • Masse salariale de l’équipe : 71 millions $ (90 M$ CAD)

Le terrain du Tropicana

  • Début de construction : 1986
  • Ouverture : 1990
  • Coût de construction : 138 M$
  • Capacité assise (en 2021) : 25 000
  • Fin du bail avec les Rays : 2027
  • Propriétaires : Ville de St. Petersburg
  • Administrateurs : Rays de Tampa Bay

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