ReutersLa performance étonnamment mauvaise de Joe Biden lors du débat de jeudi soir a provoqué la panique, la confusion et même la tristesse au sein du Parti démocrate, y compris parmi les proches du président.
Des discussions sérieuses ont actuellement lieu au sommet du parti, à la Maison Blanche et dans la campagne Biden-Harris sur une série d’options, l’une d’entre elles étant de savoir si Joe Biden devrait se retirer de sa candidature à la présidence.
Les responsables démocrates, les agents politiques et les proches du président dressent le portrait d’un Parti démocrate inquiet, sérieusement préoccupé par la force de son candidat et par sa capacité à battre Donald Trump en novembre.
Parmi les alliés du président avec qui j’ai parlé, certains se sont inquiétés de la manière dont s’est déroulée la préparation du débat d’Atlanta.
Ces gens disent que M. Biden était trop préparé et surmené par son équipe de campagne – et que si on lui avait donné plus de temps pour se reposer pendant la semaine précédant le débat, il aurait fait beaucoup mieux. Peut-être qu’on lui a mis trop de voix, de points de vue et de données en tête, m’a suggéré une source de la campagne, et que cela l’a simplement déstabilisé.
Même si cette analyse est peut-être correcte, l’affirmation selon laquelle le président était fatigué et surmené ne contribuera pas à apaiser les craintes bien réelles selon lesquelles l’âge avancé de M. Biden pourrait avoir un impact sur sa capacité à remporter cette élection.
Ces craintes quant à l’âge, à la santé mentale et à l’endurance du président – ainsi que l’insistance sur la nécessité de faire quelque chose à ce sujet – sont loin d’être nouvelles.
En septembre dernier, le célèbre chroniqueur politique David Ignatius, qui était un proche de Biden, avait déclaré que le président devait se retirer. En février, Ezra Klein du New York Times avait tenu des propos similaires dans une tribune qui avait suscité à la fois le buzz et l’irritation au sein de la Maison Blanche.
Jusqu’à présent, ces voix étaient isolées. Cela a changé après le mauvais débat d’hier soir.
Aux petites heures du vendredi matin, une série de stratèges démocrates de premier plan, d’experts et d’anciens responsables se sont joints à l’appel lancé à M. Biden pour qu’il se retire. Je suis apparu dans Morning Joe, une émission matinale politique américaine que le président regarde fréquemment. Joe Scarborough, animateur de l’émission et défenseur du président, a souligné que même si M. Biden peut encore gouverner le pays, il n’a peut-être plus ce qu’il faut pour remporter les élections.
Alors, où cela laisse-t-il Joe Biden ?
Tout d’abord, il est important de se rappeler que la décision de continuer ou non lui appartient – plus ou moins – entièrement. À ce stade, s’il ne veut pas reculer, il est pratiquement impossible qu’il soit retiré du ticket. Une source de campagne m’a dit que toute décision de démission serait prise par un très petit groupe comprenant le président, son épouse et sa sœur, Val Biden.
Deuxièmement, à l’heure actuelle, le débat sur la question de savoir s’il faut remplacer M. Biden se déroule en public parmi les experts et les anciens responsables, mais il n’a encore lieu qu’en privé parmi ceux qui ont une réelle influence.
En effet, ce matin, plusieurs alliés du président (qui sont également, maladroitement, présentés comme ses remplaçants potentiels) se sont tournés vers la télévision et les réseaux sociaux pour le défendre.
Le gouverneur de Californie, Gavin Newsom, s’est déclaré “très fier du président”. Le gouverneur de Pennsylvanie, Josh Shapiro, a dit aux démocrates de “cesser de s’inquiéter”. Le sénateur John Fetterman l’a exprimé sans ambages : « Je refuse de rejoindre les vautours démocrates sur l’épaule de Biden. »
D’après mes informations, aucun changement n’est prévu dans l’immédiat. L’équipe souhaite donner au président une chance de sortir en public et d’effacer le souvenir de cette apparition au débat.
Vendredi, lors d’un rassemblement nettement plus énergique en Caroline du Nord, M. Biden a tenté de mettre un terme aux inquiétudes concernant son âge et sa performance dans les débats. “Je sais que je ne suis pas un jeune homme”, a-t-il déclaré. “Je ne me présenterais pas à nouveau si je ne croyais pas de tout mon cœur et de toute mon âme que je peux faire ce travail.”
Samedi, il se rendra dans la région ultra-riche des Hamptons, dans l’État de New York, pour des collectes de fonds avec des donateurs démocrates.
Une source de campagne me dit que, pour le moment, les chances qu’il se retire ne soient que d’environ 5 %. Mais si les donateurs devaient l’abandonner en masse, ils reconnaissent que cela pourrait changer et inciter à une décision plus rapide concernant sa candidature.
Les sondages sur la réaction de l’opinion publique au débat devraient être disponibles dans les prochains jours. Ils orienteront également les discussions.
La campagne fait déjà état de données de sondage instantanées sur le débat qui montrent que les électeurs indépendants ont eu une réponse plus défavorable à Donald Trump qu’à Joe Biden. Ils espèrent que cela se reproduira dans les sondages ultérieurs.
Joe Biden a été mis à mal à de nombreuses reprises au cours de sa carrière politique. Lorsqu’il s’est présenté pour la première fois au Sénat, on lui a dit qu’il était trop jeune. Lorsqu’il a envisagé de se présenter à la présidence en 2016, on lui a dit que ce n’était pas son tour. Et en 2020, de nombreuses personnes ont estimé qu’il ne représentait pas l’avenir d’un Parti démocrate diversifié.
Il a pris l’habitude d’ignorer les sceptiques. Les seules personnes en qui il a vraiment confiance sont les quelques proches conseillers qui le accompagnent depuis des années. On m’a dit que ces conseillers, dont Ron Klain et Mike Donilon (qui l’ont préparé à ce débat désastreux), pensaient également que Joe Biden était la seule personne capable de battre Donald Trump.
Ils avaient raison en 2020. Ont-ils encore raison aujourd’hui ?
Oui, Joe Biden a l’habitude de rebondir, mais de nombreux démocrates craignent que cette fois-ci, ce soit différent.
