«Arlette» : «J’aime les gens qui n’ont pas peur de se casser la gueule» – Mariloup Wolfe

«Arlette» : «J’aime les gens qui n’ont pas peur de se casser la gueule» – Mariloup Wolfe

La présence, en tête d’affiche, de Maripier Morin, fait d’«Arlette» l’un des films les plus attendus de l’été. Réalisé par Mariloup Wolfe et mettant en vedette, entre autres, Gilbert Sicotte et David La Haye avec des apparitions de Lara Fabian et Micheline Lanctôt, cette comédie à l’humour parfois noir examine sans complaisance notre rapport à l’image.

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«Notre rapport à l’image est tellement biaisé aujourd’hui à cause des réseaux sociaux, à cause de cette pression qu’on ressent de la société d’exister et d’être vu», de commenter Maripier Morin lors des entrevues de promotion du film. Et elle en sait quelque chose, ayant effectué ses débuts au petit écran dans la téléréalité «Occupation double» avant de devenir l’une des «beautés» du «Banquier» puis finalement chroniqueuse, présentatrice vedette adulée par le public… avant de chuter lourdement de son piédestal suite à des allégations d’agressions sexuelles, de comportements déplacés et de propos racistes.

Si elle revient aujourd’hui en force en portant «Arlette», c’est parce que Mariloup Wolfe l’a choisie au terme d’un processus d’auditions rigoureux. Un choix qu’elle a dû défendre bec et ongles. «J’ai beaucoup de candeur, a confié la cinéaste. Et je ne pensais pas, bien honnêtement, que ça aurait eu cette ampleur-là. J’ai vraiment fait un travail créatif, je lui ai fait passer quatre auditions. […] Est-ce que j’étais consciente de ce qui avait été dit? Oui, certaines parties. Après… Est-ce à moi d’être le tribunal? Ce n’est pas ma personnalité. Et je trouve ça dommage pour tous les artisans.»

«Quand Maripier est venue à l’audition, les mots dans sa bouche résonnaient complètement autrement. Elle a une vulnérabilité et une fragilité et les mots prenaient alors un tout autre sens. J’ai été ébranlée», a-t-elle noté.

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Une si longue attente

Le long métrage suit Arlette Saint-Amour (Maripier Morin), une directrice de magazine nommée ministre de la Culture par le premier ministre (Gilbert Sicotte) du Québec. Immédiatement la cible des attaques toute la classe politique masculine, elle se met rapidement à dos le ministre des Finances (David La Haye) en exigeant qu’il remplisse la promesse électorale du parti d’octroyer 100 millions $ à son ministère. Et la bataille que livrera Arlette ne sera pas que politique.

En mettant en scène une jeune femme jetée dans «la fosse aux lions» de la politique, «Arlette», cette «fable à grand déploiement» pour la cinéaste, parfois grinçante et souvent féroce, aborde pêle-mêle la misogynie, le féminisme et la brutalité de la politique en insistant sur l’image que l’on projette au travers de dialogues remarquablement bien écrits, de références et clins d’oeil historiques et culturels qui égratignent sans complaisance celles et ceux qui nous gouvernent.

«Arlette» avait déjà fait l’objet de dépôts auprès des institutions, Marie Vien («La passion d’Augustine») ayant travaillé sur le scénario pendant 10 ans. Quand le projet est arrivé dans les mains de Mariloup Wolfe, «j’avais 24 heures pour donner ma réponse. Après ma lecture, j’ai eu besoin de rencontrer l’auteure. C’est une proposition forte, c’est une comédie satirique, une fable qui n’a pas de morale, il fallait que j’y adhère, que je le comprenne, que j’aie des images.»

«Toutes les références à la monarchie, à Versailles, ça m’a complètement allumée. Je venais, en plus de regarder “The Crown”. Avec “Arlette”, j’étais dans un monde moderne avec des thèmes universels comme la culture – c’est toujours le même débat -, l’argent, le féminisme, cette femme catapultée dans un autre milieu dont elle ne sait pas comment il fonctionne et qui fait des erreurs, le pouvoir de l’image, toutes les références historiques… Il y avait tellement d’affaires avec lesquelles je pouvais m’amuser et ne pas être “straight”.»

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La réalisatrice a tout visualisé dès le départ. «On assume les intertitres, on assume l’humour, on assume l’ironie, on assume la satire, mais tout cela – et c’était vraiment mon cheval de bataille -, dans un jeu minimaliste, vrai.» Et elle s’est également adjointe les services d’Yves Bélanger, le directeur de la photographie collaborateur fréquent de Jean-Marc Vallée.

De ZZ Top à Lara Fabian

Au casting, Mariloup Wolfe a choisi ses acteurs en fonction de «leur intensité. Je suis quelqu’un qui aime l’intensité, la passion, l’investissement. J’aime ceux qui osent, peu importe leurs opinions. J’aime les gens qui n’ont pas peur de se casser la gueule, les gens qui ne vont pas avoir peur d’être laids, les gens qui vont se laisser aller.»

Outre Maripier Morin, Gilbert Sicotte devient premier ministre, Antoine Bertrand, chef de l’opposition, Benoît Brière en attaché politique, Paul Ahmarani en attaché de presse, Lara Fabian ministre française du commerce – anecdote amusante: Jean Dujardin et Omar Sy ont été approchés, mais ils n’étaient pas disponibles –… et Micheline Lanctôt, présidente de l’Assemblée nationale. Pour cette dernière, la cinéaste a pris «la reine Elizabeth II comme référence. Elle l’a fait par amitié parce qu’elle était ma prof à Concordia.»

Quant à David La Haye, il souhaitait incarner l’attaché de presse. Aux auditions, «j’avais la barbe au sternum et les cheveux longs. J’avais le look ZZ Top! Mariloup me dit qu’elle a vu mon audition, qu’elle m’aime beaucoup, que je réponds facilement aux indications… et me demande ce que je penserais d’incarner le ministre des Finances. Qu’elle m’ait offert ce rôle alors que j’avais ce look! J’avoue que j’ai eu peur parce que ce rôle est à l’opposé de moi, c’est un dur, un austère. Et surtout, il est misogyne alors que je suis tout l’inverse.» Le comédien a puisé dans son répertoire théâtral classique pour construire son personnage, en faisant «un mélange entre Iago [personnage du “Othello” de Shakespeare] et Richard III”.

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Maripier Morin, elle, s’est préparée pendant «quatre mois de “coaching” intensif. Quand je prends un projet, je choisis un coach en lien avec le projet. Mariloup a accepté que je travaille avec Daniel Parent. Je connaissais le texte de tout le monde.» Sans rien divulgâcher, la comédienne a également tourné une scène intime avec Lara Fabian. «C’est l’un de mes moments préférés du tournage. Lara est d’une douceur infinie, tellement gentille. Comme toutes les femmes, j’ai un rapport étrange avec mon corps alors que je trouvais le sien tellement beau. Et je trouvais qu’on avait le même genre de corps et j’ai trouvé drôle d’être capable de la trouver belle alors que je suis toujours en train de me déprécier, comme on fait toutes. À partir de ce jour, il y a eu un “avant” et un “après” dans la manière que j’ai de voir mon corps. Tout ce film a été thérapeutique pour plein de raisons.»

Cerise sur le gâteau, «Arlette» sera présenté au Festival du film francophone d’Angoulême à la fin du mois d’août. «On est tellement contents! Leur enthousiasme face au film! J’avais le goût de pleurer parce que le processus a été ardu pendant la dernière année. D’avoir des gens extérieurs qui ne font qu’apprécier le texte de Marie, le jeu d’acteurs, la proposition cinématographique… ça m’a fait un baume! Et on va aussi être présentés à Namur en Belgique. Le film commence sa petite vie européenne», a conclu Mariloup Wolfe.

«Arlette» arrive dans les salles obscures de la province dès le 5 août.

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