“Judith Godrèche a ouvert un boulevard et on doit, moralement, tous y aller”

“Judith Godrèche a ouvert un boulevard et on doit, moralement, tous y aller”

Si elle devait être une héroïne, elle ne serait pas héroïne de fiction, mais « Neige Simon, Christine Angot, Camille Kouchner Vanessa Springora… Toutes ces femmes qui prennent la parole, et qui ont la force. » Isild Le Besco publie Dire vrai chez Denoël, un récit autobiographique puissant, éprouvant, déchirant, toujours nuancé aussi, où elle retrace avec courage son parcours de femme. On a l’impression que chaque mot de son livre a été réfléchi, pesé, soupesé, et repesé.

Elle écrit : « Je vais avoir 42 ans. J’ai envie d’être moi, d’accueillir la petite fille heurtée, l’adolescente manipulée, la jeune fille meurtrie, ou la mère détruite, et mettre fin à ces cycles sombres. » Isild Le Besco a toujours écrit sur les femmes et sur leur parcours, souvent très difficiles. Mais là, il fallait « que je dise « je » parce qu’on a cette opportunité, ce boulevard, d’être aujourd’hui entendue dans ce qu’on surpasse tous. C’est un cadeau même s’il est dur à porter, de pouvoir prendre cette parole pour nous toutes. »

Une agression qui ouvre la parole sur d’autres

Son livre s’ouvre par le récit d’une agression en 2023 dans un train où Isild Le Besco a une altercation avec une femme manifestement instable qui la frappe et lui enfonce son doigt dans l’œil. L’actrice est alors pratiquement sans connaissance. Quelques jours plus tard, sa petite sœur lui dit qu’elle l’a appelée du train pour lui répéter en boucle : « Je ne suis pas une victime ! » Elle revient sur cet incident violent : « Avec mon visage tuméfié, les gens me voyaient tout à coup comme une victime. J’étais en arrêt de travail. J’étais alors invitée à être victime. Les gens s’inquiétaient pour moi. Cela m’a plongée dans cette sidération où j’ai pu relater toutes les fois où j’ai été victime dans ma vie, mais où je n’avais pas eu envie d’admettre que je l’étais. C’est difficile de dire qu’on est victime. »

Dire la parole juste

Lorsque la comédienne Judith Godrèche a évoqué sa relation avec le réalisateur Benoît Jacquot, puis porté plainte pour viol, Isild Le Besco qui a vécu avec lui de ses 16 ans à ses 24 ans, a décliné toute prise de parole à la police et aux média. Elle explique : « J’avais envie que ce soit vrai, donc nuancé, et pas que l’on prenne dans mes propos une chose qu’on a envie d’entendre. C’est tout un système, toute une histoire. On vit toutes tellement ça, que cette parole, il faut la dire juste. »

La violence de l’enfance qui prédispose à être violentée adulte

Dans sa famille, les enfants étaient frappés. Elle écrit dans son livre : « J’étais une proie. Cela vient de l’enfance. ». Isild Le Besco : « Mais ce ne sont pas que des coups. Tellement de femmes subissent la violence, physique ou mentale. Physique, elle est palpable, on la voit et c’est un drapeau rouge… Tellement de femmes alors qu’elles n’ont pas été tapées, ont été négligées, rabaissées, humiliées, partout, même à l’école. La femme l’enregistre et accepte tout naturellement ce continuum. Et devient une proie. »

La suite (Luc Besson, Judith Godrèche, Jacques Doillon, Benoît Jacquot, l’emprise sur le corps aussi, le viol, porter plainte ou pas, la guérison…) est à écouter…

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